5 Novembre au 25 Novembre 2008




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GRILLE HORAIRES





Les Rendez-Vous du Mois


Mercredi 5 Novembre 20h30



EL OTRO de Ariel Rotter

en présence de Jean Marie Paoli
(Association France Amérique Latine)




Vendredi 7 Novembre 20h30


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DERNIER MAQUIS de Rabah Ameur-Zaïmeche

en présence de Rabah Ameur-Zaïmeche et de Michelle Guerci, journaliste et chargée de Cours à Paris VIII
Avec le soutien de l’ACID
et en partenariat avec la librairie l'Alinéa


Jeudi 13 Novembre 20h30
(Mois du Documentaire)


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A COTE de Stéphane Mercurio et
Anna Zisman

En présence de Anna Zisman


Vendredi 14 Novembre 18h00
Commémoration de la mort de Martin Luther King


LA HARPE DE BIRMANIE de Kon Ichikawa

Intervenant et médiateur : Vladimir Biaggi (Ecrivain, Philosophe)
En partenariat avec La Direction Culturelle, L’Eglise Réformée, La Médiathèque Louis Aragon, La Librairie L’Alinea


Mardi 25 Novembre à partir de 18h30
(Mois du Documentaire)


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"Regards sur un Massacre"
VALSE AVEC BACHIR de Ari Folman
MASSAKER de Monika Borgmann, Lokman Slim
En partenariat avec
la Médiathèque Louis Aragon
et l'Alinea
En présence de Pierre STAMBUL Vice-Président de l’UJFP
(Union Juive Française pour la Paix)



Du 12 au 26 Novembre



Les
INSTANTS VIDEO
Festival Numerique et Poétique
Six programmations diffusées en levée de rideau des séances.
Diffusion permanente d’une programmation
sur moniteur dans le hall.
Programme complet sur : http://www.instantsvideo.com
en partenariat avec la MJC Martigues



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Du 5 Novembre Au 25 Novembre



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LA VIE MODERNE
Raymond Depardon




Le film de Raymond Depardon a été présenté au dernier festival de Cannes. Deux ans ont passé depuis Profils paysans et le cinéaste vient prendre des nouvelles des hommes et femmes qu’il a rencontrés lors de ses pérégrinations. Le documentariste parcourt les Cévennes côté Lozère et haut Gard, de janvier à décembre, cette France méconnue, celle des hameaux, des fermes et des lieux-dits, où survit dans des conditions souvent précaires une classe destinée à disparaître. Depardon nous raconte son amour pour ces gens de la terre , respecte leurs silences, souvent longs, leurs hésitations. Il n’est pas là en sociologue. Peu volubiles, ses interlocuteurs ne dévoilent pas grand-chose de leur vie, mais partager un instant de leur quotidien suffit à Depardon, et au public qu’il vise. Les gros plans sur les visages ridés et durcis de ces hommes et femmes au sourire hésitant, restent la marque de fabrique du film. Celle qui fait de ces derniers terriens les héros d’une France oubliée, et, sans complaisance les témoins ultimes d’un monde qui va disparaître, celui des parcelles, grandes comme des mouchoirs de poche et des bergers sans brebis.

Entretien :






LA VIE MODERNE par Thierry Méranger (Cahiers du Cinéma)

La loi des séries pourrait bien fausser la perspective : c’est rendre un hommage imparfait au dernier film de Raymond Depardon que de le considérer comme une clôture. La Vie moderne est pourtant bel et bien l’aboutissement d’une trilogie de longue haleine, volet ultime d’un triptyque dont les premiers tableaux, aux titres programmatiques - L’Approche, puis Le Quotidien, accouchés en 2001 et 2005, ont naguère su convaincre. La première surprise tient alors à l’émancipation d’un tiers ouvrage refusant littéralement de tomber dans le panneau pour substituer à la clausule attendue un épilogue radicalement neuf qui, s’il hérite ostensiblement de ses aînés, parvient sans peine à se rendre visible - et audible - en toute indépendance. Disparaît ainsi le titre fédérateur de la série, Profils paysans, au bénéfice de cette seule Vie moderne dont la première vertu est justement de souligner que la face vaut le profil et que la rigueur des dispositifs documentaires ne fait sens aujourd’hui qu’à travers l’expression de leurs penchants transgressifs.

Étape, donc, déterminante et passionnante que ce dernier opus - justement salué par le dernier Cannes - dans le cheminement de Depardon et de sa compagne, Claudine Nougaret, ingé-son et productrice au rôle essentiel. Car la sélection à Un certain regard et la projection impeccable salle Debussy ne furent rien moins, en mai, que capitales pour le projet du film. À l’écran, d’emblée, le plus somptueux des travellings arpente une route des Cévennes. Résonne l’Élégie opus 24 de Gabriel Fauré ; lui succèdera bientôt la Pavane pour orchestre. Semblable mouvement a déjà été esquissé dans L’Approche. Les mêmes accords ont servi d’indicatif aux deux premiers épisodes de la série. Tout a changé pourtant : le Super 16 s’est mué en Scope 35 mm, expérimentant au passage avec la souplesse de la caméra Pénélope l’un des derniers fleurons de la technologie moderne. Volonté déclarée par le cinéaste de gagner en ampleur, de « passer de l’audiovisuel au cinéma » comme il le dit lui-même. Sans doute pour déjouer les stéréotypes d’un filmage direct dont il fut justement le plus acharné des défenseurs. Mais aussi, et surtout, pour couper court à toute lecture misérabiliste de son entreprise et éloigner à tout jamais le spectre d’une ruralité pittoresque.



De fait, d’autres travellings qui articulent les différentes séquences succèdent au coup de maître inaugural et, scandant le film, font glisser la chronique paysanne vers la fiction d’un road movie. Les gros plans, habituellement délaissés, élargissent la palette du filmeur. Impureté délibérée, revendiquée comme l’illustration d’une « équation trouvée avec la forme », qui culmine naturellement en toute fin avec deux séquences exemplaires. Un dernier travelling - arrière cette fois, admirable boucle - permet au cinéaste de sortir de son film sur la promesse et la certitude d’un retour. Suit l’un des plus émouvants génériques de l’histoire du cinéma documentaire. Depardon refuse pour ses paysans l’anonymat sans visage du déroulant. Chacun est présenté - regard caméra, lettrage spectaculaire, arrière plan emblématique - comme la vedette d’un film de fiction. Pas question de recycler des images déjà vues : ce sont à chaque fois des plans nouveaux qui ont, à dessein, été tournés. Ultime coup de force d’un documentariste qui revendique comme modèles faussement paradoxaux les plans de Attack ! où Robert Aldrich manifestait la présence de Jack Palance.



Il y aurait méprise, malgré tout, à imaginer une quelconque conversion de Depardon au documentaire vernissé. Le générique hollywoodien n’a valeur de manifeste qu’au regard de la trace qu’il laisse. Constatons que La Vie moderne met en oeuvre, sans anathème ni exclusive, tous ses moyens de cinéma dans un hommage pas plus compassé que compassionnel au monde rural. Car bien loin de céder à une « performance cinéphilique » qu’il exècre, le cinéaste plaide d’abord pour l’impureté fondamentale de son art, conservant et juxtaposant en un même tri ratés et cadrages policés, éprouvant sans cesse limites et frottements des dispositifs mis en place pour jouer de leur juxtaposition et de leur porosité. Le travelling vespéral déjà cité, que l’on devine issu d’une mise en place méticuleuse, débouche sur un beau moment de « cinéma vérité » lorsqu’il doit faire halte inopinément devant les brebis de Marcel Privat, figure essentielle de la trilogie.

Mais surtout, plus nettement que jamais - si l’on excepte le cas des Années déclic, ouvertement autobiographique -, le cinéaste apparaît dans son propre film. Indispensable de souligner que dans La Vie moderne, où la captation de la parole l’emporte sur la restitution du travail, Depardon, à l’instigation de Nougaret, est d’abord une voix. Off, assurée, assumée. Qui dès les premiers mots de commentaire ose dans un même élan l’incipit biblique et la confidence égotique : « Au commencement, il y a ces routes. Au bout des routes il y a des fermes. Je reviens dans ces fermes. » La fin, une heure trente plus tard, en sera l’écho : « Ce soir je filme cette lumière qui n’est pas comme les autres et je ne suis pas près de l’oublier. »

Les entretiens, captivants, ne font pas exception. Au lyrisme liminaire se substitue sans heurts l’empathie de l’immersion, contrechamp indispensable à l’emphase du début. En cette occasion, Raymond a pour la première fois accepté de Claudine un micro permettant de capter directement sa voix de questionneur, relayant, au-delà de son savoir-faire, ses hésitations et ses approximations. Trahissant aussi ses origines paysannes. Et refusant, par ailleurs, le confort du hors cadre. À l’occasion d’une belle séquence de petit déjeuner dans l’aube du Vivarais, le couple fait face à Germaine et Marcel Challaye, paysans et personnages, rencontrés pour la première fois. Germaine Challaye lui offre un café, le cinéaste pour lui répondre entre en amorce à l’écran, accepte le sucre, touille son café. Se relève pour verrouiller son cadre. Ses interlocuteurs ne s’y trompent pas, lui proposent un second gâteau impossible à refuser, étendent leur sollicitude à sa compagne, qui ne doit pas sacrifier son propre café - qui va refroidir - aux impératifs de la prise de son. Toutes frontières abolies, le couple filmeur est devenu personnage de son propre film. On comprend dès lors que l’originalité du dernier volet du triptyque tient au dévoilement de sa nature autofictionnelle : Depardon, vrai moderne, rend d’abord compte de sa propre quête. Sans faire mystère, en entretien, d’un souhait émouvant : panser la blessure de n’avoir pu, su ou voulu filmer son propre père dans la ferme familiale du Garet.

Entreprise de réappropriation, donc, que cette petite fabrique documentaire dont l’appel à une technologie de pointe n’a somme toute rien de surprenant, puisqu’elle permet à une équipe réduite au strict minimum - preneur d’images et capteur de sons - le contrôle absolu de l’outil de production. Logique de résistance qui, à y regarder de plus près, érige le paysan cévenol en modèle du cinéaste. Ayant assumé, comme ses personnages, le choix d’une austérité économique - La Vie moderne est bien cette oeuvre de moyenne montagne dont l’intégrité fait fi du pittoresque et de l’alarmisme, évitant en un même élan rédempteur chant du coq et chant du cygne. Ainsi va le film, sans cesse revigoré et relancé par l’audace de son hybridation. Triomphe du plan séquence et recours au jump cut. Contraste des éclats comiques - lorsque les frères Privat, tous deux octogénaires, désapprouvent à demi-mot le mariage de leur neveu avec une citadine - et des silences tragiques - comme celui qui, pour Marcel, l’aîné aux yeux rougis, précède un poignant « c’est la fin ». Mais c’est à son cadet, l’éloquent et bien nommé Raymond que reviendra l’initiative d’une formule que Depardon ne pourra que faire sienne : « Il ne faut pas aimer son métier, il faut être passionné. »

Dossier de Presse:





BIOGRAPHIE :




Raymond Depardon occupe une place singulière dans le champ de l’image contemporaine, aussi bien en tant que cinéaste que photographe.

Né en 1942 dans une famille de cultivateurs, il commence très tôt, à l'âge de 12 ans, par photographier sa ferme familiale.
Après avoir été reporter polyvalent à l’agence Dalmas à Paris, il co-fonde en 1966 l’agence Gamma et multiplie les reportages dans le monde entier.
Parallèlement à son travail de photographe, il commence à tourner des films documentaires en cinéma direct.
Il rejoint en 1978 l’agence Magnum et continue le grand reportage jusqu’en 1981.
Il reçoit le Grand Prix National de la Photographie en 1991 et le césar du meilleur film documentaire pour « Délits flagrants » en 1995.
En 2003, il obtient l’autorisation exceptionnelle de tourner les audiences du tribunal correctionnel de Paris : 10e chambre, instants d’audiences sera présenté en sélection
officielle à Cannes en 2004.
En 2006, il est invité à prendre la direction artistique des 37e Rencontres Internationales de la photographie d’Arles.

En 2008, parallèlement à la sortie en salle du film La vie moderne, les éditions du seuil éditent « Raymond Depardon 1968 » et « La terre des paysans », et, conjointement avec Paul Virilio, il présentera en novembre à la fondation Cartier pour l’art contemporain, une installation intitulée « Terre natale ».

Il a réalisé dix-huit films long-métrages et publié quarante-sept livres.


Profils Paysans 1




Profils Paysans 2



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EL OTRO
Ariel Rotter




Pour son troisième long métrage, l’Argentin Ariel Rotter signe une belle œuvre sensorielle sur la crise existentielle d’un quadragénaire qui décide de fuir sa vie en prenant l’identité d’un autre. Le jeune cinéaste, qui démontre un véritable talent pour filmer l’indicible - notamment le temps qui passe - nous livre un gigantesque bloc de temps et de perceptions qui permet de capter avec grâce l’intériorité troublée et vidée de son personnage.

Juan Desouza, qui apprend la grossesse de sa femme, se situe à un moment charnière de son existence. Lors d’un déplacement professionnel, il découvre que l’homme qui voyageait à ses côtés est mort ; il décide d’endosser son identité et de s’inventer une profession afin d’échapper quelques temps aux bouleversements de sa vie.



Lorsque l’on découvre ce synopsis, on ne peut s’empêcher de penser à Profession Reporter de Michelangelo Antonioni ; le personnage principal d’El Otro souffre d’une absence à lui-même à la manière de Jack Nicholson dans le chef-d’œuvre de l’Italien. Ce dernier n’en finit pas d’influencer de nombreux jeunes cinéastes qui ont grandi et appris le cinéma avec ses films. Mais si Ariel Rotter s’inspire du père de la modernité cinématographique, il ne le copie pas : El Otro est surtout une œuvre sensorielle et métaphorique qui cherche à retranscrire les émotions de son personnage ; Juan veut quitter sa vie car il refuse de voir le temps qui passe et la mort qui s’approche. Il se situe entre la naissance et la mort, qui sont symbolisées par sa femme enceinte et son père au crépuscule de son existence. Chez Antonioni, l’accumulation de temps morts et l’errance sont souvent la conséquence d’un événement qui n’est pas expliqué. Nous sommes alors dans le constat avec un cinéaste qui filme l’après. L’œuvre de Rotter relève plutôt de la reconstruction de l’être, qui traverse des espaces vidés afin de redécouvrir ses désirs, ses instincts et surtout qui il est.



Le film débute par une consultation dans le cabinet d’ophtalmologie de la femme de Juan, ce qui symbolise d’emblée le dispositif du réalisateur : il veut nous faire ressentir le point de vue et les perceptions de son « héros ». Son épouse lui prescrit de porter des lunettes, mais il ne les mettra pas ; il refuse de voir et d’affronter les bouleversements de sa vie. Juan cherche alors à se détacher de lui-même en fuyant la banalité et le caractère mécanique de l’existence, ce qui est signifié par des séquences qui se répètent inlassablement. Le personnage est souvent filmé seul au sein d’espaces dépeuplés, ce qui symbolise très bien sa crise existentielle. Le travail sur le son est également intéressant : la respiration du personnage est mise au premier plan, ce qui permet de ressentir sa présence et son trouble devant les éléments qu’il contemple. Ces effets rappellent le cinéma de Naomi Kawase et sa caméra tremblante qui montre l’émotion de la cinéaste devant les éléments filmés.



Rotter s’impose surtout comme un cinéaste qui sait capter l’indicible avec en point d’orgue une figure de la trace qui est essentielle dans le métrage. Le personnage contemple constamment les vestiges du temps comme dans cette séquence clé où il visite la maison d’un couple mort de vieillesse. Leurs objets, qui représentent la présence passée et les fragments de l’amour qui unissaient les disparus, troublent l’esprit de Juan qui prend conscience des ravages du temps. Rotter démontre alors qu’il sait filmer aussi bien la portée symbolique et nostalgique des objets que les tourments de ses personnages. La séquence finale d’El Otro résume à elle seule le talent plein de maturité de ce jeune réalisateur : Juan, qui a enfin décidé de rentrer chez lui, emmène son père dans sa salle de bain afin de le laver. L’auteur filme le lit défait, où le père, au crépuscule de sa vie, dormait. Sur ces traces de l’être, résonnent les paroles du père et du fils. Nous sommes alors en présence d’un pur bloc de temps et d’émotions qui démontre toute la puissance métaphysique et l’intelligence de la mise en scène de Rotter. Son cinéma, composé d’espaces vidés et de perceptions visuelles et corporelles, est composé de réminiscences de l’histoire cinématographique moderne, mais l’Argentin arrive à trouver un ton et un style propres grâce à sa capacité admirable à filmer l’inexprimable.

Stéphane Caillet






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DERNIER MAQUIS
Rabah Ameur Zameïche




Dans ce film foncièrement anti-cliché, Rabah Ameur Zaïmeche tisse le politique, le religieux et le social avec une grande finesse. Et une grande humanité.
Ce qui frappe ici est la souveraineté avec laquelle s'articulent problématiques sociales et cohérence des caractères. Si le moteur narratif du film est l'ouverture d'une mosquée au sein d'une entreprise, permettant une solide réflexion sur les rapports entre religion, travail, communauté et individualisme, Rabah Ameur-Zaïmeche, remarqué pour ses deux premiers films Wesh Wesh, et Bled number one, transcende toute catégorisation par la flamboyante galerie de portraits et d'affects qu'il dessine.



Prisonnier d'aucun sujet et affranchi de tout personnage central, le film navigue avec une admirable liberté au sein de cette unité de production.
Invention d’un pays, invention d’un peuple : ce que créent Ameur-Zaïmeche et sa bande d’acteurs et de techniciens, c’est, au sens plein et ressourcé du terme, une utopie poétique. Certainement pas un pays idéal, mais un lieu au-delà de toute localisation, un espace séparé où l’art déploie sa pleine puissance de figuration et de pensée.
Dernier maquis capte avec acuité les remous de l'existence, sans fournir de réponse, mais en poussant toujours plus loin la précision du regard sur l'Hexagone d'aujourd'hui.


DOSSIER RENOIR :


(cliquez sur l'image)

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PEUR(S) DU NOIR



Le frôlement rapide de pattes d’araignées sur une peau nue…
Des bruits inexplicables que l’on entend la nuit, enfant, dans une chambre close…
Une grande maison vide dans laquelle on devine une présence…
L’aiguille d’une seringue qui se rapproche inexorablement…
Une chose morte emprisonnée dans un bocal de formol…
Le regard fixe d’un grand chien qui montre les dents…



Autant de frissons que nous avons éprouvés, un jour ou l’autre, comme les artisans de ce voyage qui nous mène d’un trait au pays de l’angoisse.

Six grands auteurs graphiques et créateurs de bande dessinée ont animé leurs cauchemars, griffant le papier de leurs crayons affûtés comme des scalpels, gommant les couleurs pour ne garder que l’âpreté de la lumière et le noir d’encre de l’ombre.
Leurs récits entrelacés composent une fresque unique, où phobies, répulsions et rêves prennent vie, montrant la Peur sous son visage le plus noir…
Peurs blanches et humour noir pour les salles obscures….

Les enfants ont peur du noir, mais beaucoup d’adultes aussi !
L’obscurité empêche de voir, on peut alors se convaincre de la présence de bêtes, d’insectes ou de tous êtres malveillants.
Dans le langage populaire, on a des idées noires, on vit dans une misère noire ou encore nous avons de noirs pressentiments…
Cette sensation d’inquiétude rattachée au noir remonte à la nuit des temps.

Blutch, Charles Burns, Marie Caillou, Pierre di Sciullo, Jerry Kramsky, Lorenzo Mattotti, Richard McGuire, Michel Pirus, Romain Slocombe,
remontant le fil de leurs terreurs, ont accepté d’animer leurs dessins et de leur insuffler avec leur style unique le rythme de leurs cauchemars.


SITE du FILM :





Bande Annonce :











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LE BAL DES LUCIOLES



Ces quatre courts métrages, réalisés par une équipe lettone dynamique, sont de jolies variations sur la nature et le monde vivant qui s’y cache. Avec des inventions visuelles étonnantes, des marionnettes attachantes et beaucoup d’humour, la vie quotidienne de cette faune invisible est décrite pour le plus grand plaisir des petits et des grands.

Dossier de Presse :

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LES BUREAUX DE DIEU
Claire Simon




Présenté à la Quinzaine des réalisateurs, Les Bureaux de Dieu, de Claire Simon, se situe à la frontière du documentaire et de la fiction. La réalisatrice de Ça brûle (2006) y filme une belle brochette d'actrices dans le rôle de conseillères du Planning familial. Nathalie Baye, Béatrice Dalle, Isabelle Carré, Rachida Brakni, Nicole Garcia, Marie Laforêt, Anne Alvaro et d'autres encore, ont à charge de recevoir la parole des femmes qui viennent les consulter. En face d'elles, de jeunes comédiennes non professionnelles leur confient leurs angoisses sur la contraception, la grossesse, l'avortement... Dans une série d'entretiens filmés en de longs plans-séquences, ces duos de comédiennes rejouent ainsi certains des rencontres auxquelles a assisté Claire Simon pendant le temps qu'elle a passé dans un bureau du Planning familial de Marseille, et qui ont servi de matière à son scénario. Autour, des bribes de fiction s'esquissent, qui façonnent le bureau comme une entité vivante, et donnent au film, comme le pose très justement Nicole Garcia, une structure de "chant polyphonique".



L'expérience est suffisamment originale pour qu'on ait eu envie de les rencontrer à l'issue de la projection. Mais alors que l'on espérait les entendre parler du Planning familial, les actrices ont plutôt eu envie d'évoquer leur travail sur ce film.

Nathalie Baye admet ainsi qu'elle était "complètement "out" par rapport au problème du Planning familial". Et qu'elle a découvert avec ce film le "désarroi, la solitude de ces femmes de tous les milieux confondus qui, à l'heure de l'hyper-communication, quand le sexe est partout, ne peuvent pas communiquer, ni avec leurs familles ni avec leurs amis, autour de la grossesse, de la pilule, etc." Nathalie Baye s'est laissée surprendre par "l'authenticité, la vérité" dont faisaient preuve, face à elles, les actrices non professionnelles, et qui exigeait en retour une sincérité de leur part à elles, les professionnelles. Elle compare l'expérience à celle de jouer avec un enfant, ou chez Godard, "qui gomme tous les petits artifices".



Ce "trouble" qu'ont connu les actrices a sans doute à voir avec le fait que les jeunes femmes avaient toutes vécu des choses qui les rattachaient au texte qu'elles avaient à jouer. Et que les interprètes des conseillères ne les ont pas rencontrées avant le tournage. Le récit de la prostituée bulgare, par exemple, ne reflète pas l'histoire de la femme qui le raconte, "mais c'est quand même bien son job", dit Nicole Garcia, qui avait le sentiment d'être "comme prise en défaut" lors de ces plans-séquences.

Nathalie Baye évoque, elle, la jeune bourgeoise au collier de perles qui est persuadée que l'avortement qu'elle envisage va la détruire : "Elle était dans une telle angoisse quand elle jouait qu'elle m'a bouleversée. Du coup, on n'avait pas besoin de jouer l'écoute. Ça se faisait tout seul." Le film déborde largement la question du Planning familial. "C'est rare, affirme Rachida Brakni, un endroit où il y a un tel brassage. C'est comme la prison, ou l'hôpital. Ça peut donner Le Radeau de la Méduse ou l'arche de Noé. Le seul dénominateur commun, c'est être une femme qui a un besoin." Nicole Garcia enchaîne : "On a vu beaucoup de films avec des hommes dans des bars, dans des prisons… Là, pour une fois, le cinéma montre des femmes entre elles."
Isabelle Regnier


EXTRAIT:





DOSSIER DE PRESSE :



Lien Planning Familial :



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DES TROUS
DANS LA TETE
Guy Maddin




Guy Maddin, voici un nom qui résonnera aux oreilles des curieux, de ceux qui savent prendre les chemins de traverse pour y découvrir ce que le cinéma des très grands écrans ne nous donne que trop rarement: de la surprise, de l'étonnement, de l'éblouissement et surtout l'impression que le spectacle qui se déroule sous nos yeux, pour inattendu qu'il soit, relève de l'évidence ; en un mot comme en cent, de la poésie. Mot souvent galvaudé mais qui, dans l'univers très spécifique de ce cinéaste canadien, prend tout son sens. Nourris de littérature romantique, celle de Baudelaire et Lautréamont, de sexe et d'insolite, pour ne pas dire de surréalisme, ses films nous plongent dans le cinéma des origines. Mais pour produire quelle impression de nouveauté !



L’existence des films de Guy Maddin relève de l’anomalie heureuse. Voila près de vingt ans que ce petit gars de Winnipeg, Manitoba, Canada, fait des films impossibles. Entre autres, la Musique la plus triste du monde avec Isabella Rossellini en diabolique cul-de-jatte, patronne despotique d’une brasserie. Cette fois, il propose un muet pur jus, avec orgue en fond sonore, cartons et images noir et blanc envapées. Des trous dans la tête ! est l’histoire d’un orphelinat aux allures gothiques, paumé sur une île battue par des vents manifestement nordiques et tenu par une famille de givrés. Logique, mais ce n’est qu’un début. Il y a le père dans son labo qui expérimente une potion extraite du cerveau des enfants perdus. La mère, folle sadique, qui ne pense qu’à ralentir les irréparables outrages du temps. Il y a aussi la fille, une blondinette révoltée au regard de Lilian Gish qui affronte la tyrannie de la mère avec l’énergie du désespoir. Sans oublier le petit garçon dont le nom (Guy Maddin) suffit à traduire le rôle de témoin.

Tout se mêle bientôt entre dérapage onirique et jeux d’enfants interdits, fantaisies érotiques et conte sadomaso dans lequel font irruption sans crier gare des ados androgynes déguisés en Fantomas. « Une partie de mon enfance a été soumise aux disputes incessantes entre ma sœur aînée qui refusait de cesser de grandir et ma mère qui ne le lui pardonnait pas, nous explique le cinéaste, de passage à Paris. Cela ne m’a pas empêché de vivre cette enfance comme une période enchantée et c’est ce que j’ai voulu retrouver dans ce tournage. » Pour ce film plus improvisé que ses précédents, Maddin est retourné à la source de ses marottes.



« Je suis fasciné par ces mécanismes qui nous permettent de nous échapper des modèles universels que sont la religion, la science ou l’accumulation d’expériences. Ce qui nous définit aussi, ce sont des manières singulières de penser ou d’associer les événements. C’est l’histoire de l’enfant qui voit sa mère étendre le linge dans la maison parce qu’il pleut et qui pense qu’il va pleuvoir chaque fois que sa mère étend le linge. » Les films de Maddin n’appartiennent à aucun genre, à aucune école. Et s’il arrive parfois, comme ici, de penser fugacement à d’autres (Laughton ou Murnau), le film esquive toujours le piège de la référence ou même de l’hommage. Maddin parvient juste à filmer ses crises de somnambulisme et à nous donner envie que ce soient les nôtres.
Bruno Icher


Entretien avec Guy Maddin



Comme beaucoup de vos films, Des Trous dans la tête ! s'inspire de faits autobiographiques; parlez-nous de la façon dont vous et votre co-auteur George Toles avez écrit le scénario, et des souvenirs qui vous ont servi de base.

Le cœur de mon enfance, son essence mystique, impétueuse et fougueuse, a été marqué par une lutte sans merci qui opposait ma mère à ma grande sœur, une adolescente fraichement épanouie. Elles n'ont jamais vraiment mis de mots là-dessus, mais c'est justement ça qui était embarrassant, c'était évident. Qu'elles se disputent au sujet d'une coiffure ou d'un ourlet, c'était en réalité la présence au sein de la maison d'une jeune adulte, avec des désirs personnels, qui était à l'origine de l'opposition virulente de ces deux femelles. J'ai su que n'importe quel souvenir d'enfance devait être construit à partir de cette guerre.
George Toles a eu l'idée d'un orphelinat, qui allait abreuver le scénario d'enfants. Il a également voulu corrompre cette institution, avec une opération de prélèvements d'organes... C'est alors que j'ai eu l'idée de faire de mes parents les propriétaires. Après tout, les enfants peuvent-ils réellement comprendre ce que leurs parents ont dans la tête? Après que George et moi ayons inventé un tas de sombres secrets bien gardés des enfants timorés, il s'agissait simplement d'introduire un détective adolescent ; l'un de mes personnages favoris, et quelque chose que Louis Feuillade aurait dû explorer, mais peut-être l'a-t-il déjà fait. Et puis je me suis rappelé l'agonie du premier amour et combien ce genre de douleur se prêtait au film, donc j'ai combiné tous ces éléments et j'ai été ravi de constater qu'ils se mariaient parfaitement. Dès que la structure a semblé assez solide et sincère, j'ai pu parsemer le tout d'un million de détails sortis de ma tendre enfance. C'est littéralement une histoire vraie ; mais en beaucoup mieux !



Le film est un mélange de genres, l'horreur expressionniste, le polar, le théâtre du Grand Guignol. Pouvez-vous nous parler de ces diverses influences ?

J'ai lu une série de pièces de théâtre du Grand Guignol et j'ai décidé sur-le-champ que j'en monterai une un jour. L'occasion ne s'est pas présentée, mais quand j'ai découvert que j'allais tourner à Seattle, j'ai tout de suite pensé aux phares, qui me rappelaient cette pièce que j'adorais et qui justement avait pour décor un phare. Je pense qu'il était question d'un père et de son fils, tous deux atteints de la rage, et essayant de se tuer l'un l'autre, avant l'arrivée du bateau de ravitaillement sur leur ile isolée. Je n'ai fait qu'incorporer au scénario l'esprit sanglant de la pièce, qui correspondait parfaitement au côté épouvantable de ma propre enfance ! C'est sans doute pour cette raison que la pièce m'avait plu.
Le polar jeunesse servait mes intérêts, car pour moi, c'est une littérature très sexuelle, pour tout ce qui est dit et ce qui ne l'est pas. Alice, Les frères Hardy ; Inutile d'en dire davantage ! Les jeunes détectives se plongent toujours dans des intrigues émoustillantes, des histoires excitantes ! Et il n'y a rien de plus voluptueux que le fantasme d'être un adolescent en danger. Pour moi, en tout cas !
L'horreur expressionniste ? Eh bien, c'est ce qui arrive quand le sujet est intéressant et que c'est filmé avec beaucoup d'ombres en rapport avec l'intrigue ; des ombres longues, profondes ; de mystérieuses ombres !



Les ombres ont tellement plus d'impact en noir et blanc qu'en couleur ! En noir et blanc, elles représentent l'absence de lumière, l'absence de connaissance ; mais en couleur, l'obscurité est composée d'un grain mauve et marron, qui n'a plus de sens ! Le véritable expressionnisme DOIT être filmé en noir et blanc.


Des Trous dans la tête ! est rempli des thèmes qui vous sont chers, cependant on note une modernité palpable dans le montage : la vitesse à laquelle défilent les intertitres, la caméra au poing... On a un plus grand sentiment de liberté, et ceci nous parait en rupture avec le primitivisme obstiné et l'aspect 'construit' de vos films précédents.
Quelle est la place que vous donneriez à ce film au sein de votre œuvre ?

J'espère que ce film est le couronnement de mon œuvre, du moins jusqu'ici ! Ce n'est pas un pastiche. C'est un nouvel hybride d'éléments filmiques jamais associés auparavant. Il n'y a rien de malhonnête ! Il a son propre rythme, ni lent ni exagérément pressant. J'en suis ravi, je crois que chaque spectateur peut ingurgiter la plupart des images comme un grand verre d'eau fraiche ; et j'adore la musique. La musique emprunte le chemin le plus court pour aller droit au cœur, comme nous le savons tous, et ces images, parce qu'elles collent parfaitement à la musique de Jason, bénéficient elles aussi de ce raccourci vers le cœur ; je l'espère ! C'est la plus grande qualité du film muet ; il atteint les gens aussi instantanément et avec autant de force que la musique. C'est l'effet que j'espère obtenir avec Des Trous dans la tête !


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QUAI DES ORFEVRES
Henri-George Clouzot



Le mérite du meilleur film policier de ces années là (l' après guerre) revient sans contestation possible à Henri-Georges Clouzot pour Quai des orfèvres. Sortant du purgatoire du Corbeau, Clouzot revient à ses premières amours en adaptant (librement, cela va sans dire) un roman de Steeman Légitrime défense. Une fois de plus, c'est l'étude de moeurs qui intéresse le réalisateur, et non l'intrigue policière. Quai des Orfèvre est un document sur la police ...et c'est aussi, aujourd'hui encore, Marcel Oms l'explique très bien " le portrait le plus implacablement lucide de la France d' après-guerre à travers le portrait sans complaisance d'un flic sceptique, désabusé et banalement quotidien"



"Ce film avec son interprétation au plus haut niveau, un excellent décor et une atmosphere caustique réjouira les passionnés du cinéma français classique et compte tenu de son intrigue donnera également satisfaction aux amateurs de suspense et de mystère "
-- Michael Wilmington, Chicago Tribune
"Quai des Orfèvres est une oeuvre, non pas à voir, mais à revoir et à méditer. c'est une date dans l'histoire du film policier français. Ce film, par son réalisme rigoureux, efface d'un trait les faux gangsters. Oeuvre de qualités rares, d'une beauté formelle qui atteint à la grandeur autant que l'abject peut être grand".
--Pierre Chartier, France-Libre)
"le realisateur Henri-George Clouzot , qui obtint le titre de meilleur réalisateur à Venise pour ce film , est incapable de faire quelque chose de banal ou de standard, et c'est un don que meme un demi-siècle de distance ne peut ternir."
-- Kenneth Turan, Los Angeles Times
"On peut ne pas aimer l'atmosphère presque noire de ce drame ; on peut ne pas aimer ces personnages dont la dissection révèle avant tout les insuffisances, les défauts, voire les vices. Mais comme ils sont d'une aveuglante vérité, c'est le procès d'une époque ou d'un milieu qu'il faudrait faire et , en définitive, il ressort de l'oeuvre que Clouzot fait justement ce procès." --Jacques Doniol- Valcroze



Clouzot, inquiété à la Libération, puis de nouveau autorisé à tourner, choisit pour sa rentrée un roman de Stanislas-André Steeman dont il avait précédemment adapté deux autres oeuvres ("Le dernier des six", réalisé par Georges Lacombe, "L'assassin habite au 21", réalisé par lui-même). Il pensait avec raison qu'une intrigue policière rassurerait les producteurs et les détracteurs éventuels. Remarquablement filmé, "Quai des orfèvres" est en fait tout sauf un film policier traditionnel. Derrière l'enquête menée par Louis Jouvet reparaît tout l'univers "noir" si cher à Clouzot et qui était celui du "Corbeau" en 1943. Les rapports troubles entre Jenny (Suzy Delair) et Dora (Simone Renant) qui préfigurent ceux de Vera Clouzot et Simone Signoret dans "Les diaboliques", l'atmosphère du petit music-hall où se produit Jenny, ses lumières, sa pénombre et les désirs inassouvis des spectateurs, les interrogatoires dans les bureaux du Quai des Orfèvres portent la marque de ce grand créateur d'atmosphères. Face à Jouvet s'impose la performance éblouissante de Suzy Delair, que Clouzot avait lancée dans "L'assassin habite au 21". Le personnage de Jenny, avec son arrivisme et sa sensualité provoquante est, d'ailleurs, la clé du film.
Jacques Siclier




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A COTE
Stéphane Mercurio
Anna Zisman




S’il est un sujet brûlant d’actualité aujourd’hui, c’est bien celui de l’incarcération. Le documentaire de Stéphane Mercurio À CÔTÉ traite de ce sujet difficile et douloureux d’une façon inattendue ; l’incarcération "du côté" des familles qui viennent rendre visite aux détenus. On ne verra rien ni de la prison -si ce n’est quelques plans de l’extérieur- ni des conditions de vie des détenus...

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Les Nouvelles Aventures de la Petite Taupe



Les Nouvelles Aventures de la petite taupe mettent en scène le personnage le plus célèbre de l’illustrateur et réalisateur tchèque, Zdenek Miler. En cinq histoires (le hérisson, le téléphone, les allumettes, l’automobile, et la musique), elles relatent l’étonnante rencontre de la petite taupe avec un animal ou un objet de la vie quotidienne, source d’interrogations et d’apprentissages.
A hauteur d’enfants, tout d’abord dans la forme elle-même, ce film d’animation regroupe des histoires courtes (5 à 10 minutes chacune), elles-mêmes constituées d’une succession de situations.


Ce morcellement apparent capte l’attention des enfants et leur permet ainsi de comprendre ce qu’ils voient au moment où ils le voient. La langue, faite d’onomatopées, laisse la place à un langage des gestes et des expressions. Et si ce langage essentiellement visuel facilite la compréhension, il permet également, en sollicitant le regard, une véritable éducation à l’image. Cette simplicité, cette clarté de l’instant rend ainsi possible, en découpant l’histoire, d’en comprendre les enchaînements.


La structuration de chaque récit (présentation, situation problème, obstacles et dénouement) apparaît ici comme une métaphore de la construction des savoirs chez l’enfant. De l’étonnement à la connaissance, en passant par une nécessaire expérimentation, la petite taupe est confrontée aux objets du quotidien. Familiers et sans surprise pour nous, ces objets, dont l’étrangeté est mise en évidence par leur intrusion dans le milieu naturel, sont une véritable source d’aventures. Animés, immenses et surprenants, tels qu’ils apparaissent aux enfants, ils sont peu à peu, à la suite d’incompréhensions, de méprises et de prises de risque, appréhendés et cernés.
Par les domaines abordés (le vivre ensemble, la découverte du monde, et l’éducation à la sécurité), et les interrogations soulevées, ce film est ainsi adapté à un très jeune public (à partir de 2 ans). Mais on ne peut le réduire à sa seule visée éducative. Alliant poésie et humour dans le détournement des objets de leur fonction première, ces courts métrages datant des années soixante-dix (1963, pour La Petite taupe et l’automobile) se distinguent aussi par l’originalité du graphisme et des couleurs.
Zéro de Conduite.net


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"REGARDS SUR UN MASSACRE"

VALSE AVEC BACHIR
MASSAKER





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Vicky, Christina, Barcelona
Woody Allen





Voici l'étape espagnole du Woody Allen European Tour. Exilé de sa bulle new-yorkaise pour cause d'épuisement de son crédit auprès des studios hollywoodiens, Woody Allen a débuté ce voyage européen depuis déjà quatre ans, pour son plus grand bénéfice artistique et financier. Après trois incursions successives en Angleterre (Match Point, 2005, Scoop, 2006, Le Rêve de Cassandre, 2007), et avant une probable halte en France, Vicky Cristina Barcelona, comédie sentimentale tournée à cent à l'heure, invite le public à un exubérant arrêt ibérique.oici l'étape espagnole du Woody Allen European Tour. Exilé de sa bulle new-yorkaise pour cause d'épuisement de son crédit auprès des studios hollywoodiens, Woody Allen a débuté ce voyage européen depuis déjà quatre ans, pour son plus grand bénéfice artistique et financier. Après trois incursions successives en Angleterre (Match Point, 2005, Scoop, 2006, Le Rêve de Cassandre, 2007), et avant une probable halte en France, Vicky Cristina Barcelona, comédie sentimentale tournée à cent à l'heure, invite le public à un exubérant arrêt ibérique.



C'est à Barcelone, baroque et fiévreuse capitale catalane, que se déroule ce qu'il ne faut pas craindre de nommer l'espagnolade. Là, un beau matin, débarquent à l'aéroport deux belles jeunes femmes américaines, invitées à passer l'été par les parents éloignés de l'une d'entre elles résidant dans la ville.

Le film procède en partie de l'antagonisme qui caractérise ce tandem. Vicky (Rebecca Hall), la brune élégante, est une sage étudiante qui termine un mémoire sur l'identité catalane et a laissé au pays son fiancé, jeune businessman aussi piquant qu'un pot de yaourt. Cristina (Scarlett Johansson), la blonde explosive, est une épidermique velléitaire en quête de vocation artistique, d'expériences nouvelles et de sensations fortes.



Le réalisateur va donc s'amuser à soumettre ces deux modernes jouvencelles à un jeu trépidant qui brouille la donne de départ. Du moment où elles posent le pied sur le sol espagnol, les événements ne cesseront de s'accélérer, les esprits de s'échauffer, les coeurs de s'affoler. L'obtention de ce précipité passe par l'ajout d'un puissant réactif local. Il s'agit de Juan Antonio (Javier Bardem), artiste peintre exalté et ténébreux, qui, de notoriété publique, n'est jamais vraiment sorti de la relation passionnelle et violente qu'il entretient avec son ex-femme, Maria Elena (Penélope Cruz), qui a pourtant failli le trucider d'un coup de couteau.

Plus que les charmes réels de l'individu, c'est cette rumeur qui incite Cristina, avide de romanesque, à en tomber raide amoureuse lorsqu'elle le croise au vernissage d'une exposition. Et c'est sa faim d'expérience passionnelle qui l'incite à répondre favorablement à l'artiste lorsqu'il propose sans détour aux jeunes femmes de passer un week-end en sa compagnie à Oviedo pour y admirer une sculpture rare du Christ et y faire accessoirement l'amour à trois après un bon dîner. Rétive à cet épicurisme frelaté, Vicky, qui bat froid Juan Antonio, se laisse pourtant entraîner dans l'aventure par Cristina.



Et ce qui doit arriver n'arrive justement pas. Victime d'une inflammation ibérique de son ulcère, Cristina s'alite, et c'est Vicky, dont la froideur cache des trésors romantiques insoupçonnés, qui se laisse finalement subjuguer par l'arsenal vieux style (dîner aux chandelles, guitare au clair de lune...) que déploie à son intention le bellâtre tourmenté.

Mais le retour à Barcelone renverse de nouveau la donne, avec l'arrivée du fiancé de Vicky, qui organise leur mariage en Espagne, et l'installation de Cristina, conquise à son tour en quatrième vitesse, avec Juan Antonio. Chez qui ne tarde pas à débarquer Maria Elena, tout juste sortie d'une tentative de suicide, et avec la folie furieuse de laquelle Juan Antonio et Cristina finissent par composer un ménage à trois, façon corrida.

L'histoire, basée sur l'accumulation des péripéties, l'accélération des ellipses et le retournement des situations, se poursuit bien au-delà de ce point et le spectateur l'appréciera pour ce qu'elle est : une fantaisie débridée servie par d'excellents acteurs et des moments de comique jubilatoire, notamment dans l'outrance échevelée que Bardem et Cruz confèrent à la perversion morbide de leur relation.

Mais le film recèle bien d'autres intérêts. L'intelligence de son style d'abord, dont la vitesse et la perpétuelle fuite en avant des personnages s'accordent avec l'architecture baroque de Barcelone, très présente dans le film. Mais aussi bien la manière dont cette fable utilise l'imagerie populaire, voire les clichés les plus éculés (sur l'Amérique aussi bien que sur l'Espagne) pour en tirer, dans la tradition du classicisme hollywoodien, une vérité universelle sur l'inconstance des sentiments.



Mais ce détour européen, qui est aussi un retour en grande forme cinématographique, permet surtout de lancer une ultime hypothèse sur le cinéma de Woody Allen. La manière exceptionnelle dont le cinéaste retrouve ses fondamentaux en filmant hors de son territoire, là où tant d'autres les perdent, fait penser qu'il n'aura jamais complètement été ce réalisateur juif new-yorkais qu'on a voulu qu'il soit. Du moins pas davantage qu'il n'est aujourd'hui anglais ou espagnol. En vérité, Allen n'est rien d'autre qu'un alien, étranger à tout, à commencer par lui-même. Il est par conséquent partout chez lui, où chacune de ses apparitions (qu'il soit ou non à l'écran) est une disparition de plus. Ce programme instable, Woody Allen l'avait définitivement formulé dans un chef-d'oeuvre intitulé Zelig (1983). A 70 ans passés, il en accomplit le destin, et c'est assez magnifique.
Jacques Mandelbaum

Conférence de presse:







Des années plus tôt:

Les Aphrodisiaques fonctionnent-ils?





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EXPERIENCE
Abbas Kiarostami





"Être à la fois cinéaste, photographe, poète… Tout ça ce sont des motivations pour vivre, pour faire chaque jour quelque chose, que ce soit du cinéma, de la photo ou de la poésie. C'est n'est pas un choix, c'est une fatalité.

Je n'écris pas les scénarii en entier. Le plus souvent, j'ai un personnage mental et avant d'écrire le scénario, j'essaye de trouver quelqu'un qui colle à ce personnage que j'ai dans la tête. Et puis j'essaye de vivre avec lui, de passer du temps avec lui et à partir de là, j'essaye de m'adapter à ce personnage que j'ai adopté. Je commence à apprendre des choses de lui. C'est comme un tailleur [Kiarostami a été menuisier, NDLR]. J'ai le tissu et pour chaque client j'essaye de faire le vêtement pour sa taille à lui. Après six mois, j'ai des choses que lui ne sait pas à propos de lui-même. C'est cet ensemble que j'utilise pour mon cinéma.

Ces acteurs non professionnels ne savent pas ce qu'ils sont en train de faire. Par exemple, pour le « Goût de la cerise », les acteurs qui sont ensemble dans la voiture ne se sont jamais vus. C'est à moi qu'ils donnent la réplique. C'est moi qui suis assis dans la voiture à côté d'eux pendant que la caméra tourne ! C'est dans le montage qu'on voit les deux personnages ensemble. Mais c'est moi qui déclenchais la caméra à bord de la voiture quand je les sentais prêt à parler de ce que je voulais. Et c'est à ce moment que je posais la question sans qu'eux sachent que je filmais. Il faut mettre les personnages dans la situation et ne pas leur demander exactement ce qu'on veut. À partir de là, on peut saisir ce qu'on désire des personnages.


Il faut faire sortir des choses et ça dépend de la manière dont on travaille. Une phrase résume bien la manière dont je travaille. Il s'agit d'un poème du poète persan Mawlana Djalal Od-Din Rumi (1207-1273) sur le jeu : « Tu es ma balle de polo poursuivie par ma crosse. Je cours sans cesse pour te suivre bien que ce soit moi qui te pourchasse. » Cela veut dire que toi tu ressembles à une balle et moi je coure derrière toi bien que ce soit toi qui me fasses courir. Il faut suivre un personnage et non pas le diriger. On ne peut pas le diriger. C'est lui qui nous dirige. C'est un être vivant avec ses propres émotions. Il faut que l'on accepte qu'il ne nous donne que ce qu'il veut de lui. Autrement ce sont des marionnettes.

Dans Ten par exemple, j'utilise une caméra fixe comme Bresson, mais avec un arrière plan qui bouge. Je trouve qu'on parle plus facilement dans une voiture car on n'est pas en face à face. Le silence aussi a une signification. On profite des temps morts pour faire quelque chose d'autre. Je trouve que les conversations les plus sérieuses on les a le plus souvent dans une voiture. C'est souvent là aussi que l'on arrive à arrêter nos divergences.

Le casting, à mon avis, est l'étape la plus importante. Comment trouver le personnage ? Nous réalisateur, nous pensons qu'on peut peut-être changer, transformer les gens. Mais à partir du moment où l'on accepte qu'on ne peut pas les changer, mais qu'il faut les accepter comme ils sont, on peut les approcher. C'est pareil avec les amis ou les proches".

Abbas Kiarostami, 2002.


Si un enfant ne peut nous comprendre...
Un enfant m’a envoyé une lettre dans laquelle il me pose une question à propos de l’arbre qui est dans sa cour. Cet arbre donne beaucoup de godjeh (sorte de prunes...). Il déguste ces fruits avec beaucoup de plaisir et se demande si l’arbre lui-même apprécie ses propres godjeh. Le réflexe immédiat serait de lui répondre que non, l’arbre ne mange pas ses fruits, mais la question va plus loin. L’enfant a une perception philosophique de cet arbre, qui mérite une explication simple, juste, profonde, à la hauteur de sa question. Si j’ai un peu de lucidité, je le dois aux vingt ans pendant lesquels j’ai travaillé avec des enfants. Ils m’ont appris que les choses sont à la fois complexes et très simples. Cette simplicité n’a rien à voir avec la médiocrité.

Quand le cinéma prend un accent un peu sentencieux, un peu amer, c’est qu’il n’arrive pas à s’exprimer simplement. Or, c’est seulement quand on s’exprime simplement qu’on s’exprime effectivement. Si un enfant ne peut nous comprendre, c’est que nous avons un point faible, c’est que nous n’arrivons pas à produire une pensée simple. Imaginer un cinéma qu’il serait toujours possible de montrer à des enfants serait une très bonne façon de vérifier si l’on parvient vraiment à faire passer ses idées. J’ai entendu dire qu’Albert Einstein considérait, à propos de ses formules mathématiques, qu’elles devaient être comprises par le premier passant.

Quand j’étais aux beaux-arts pour étudier la peinture, chaque promotion comptait une quarantaine d’étudiants. Peu d’entre eux sont devenus peintres, les autres en sortaient avec beaucoup d’informations, qui élargissaient leur compétence technique. Ils n’en devenaient pas pour autant des artistes, bien qu’ayant eu l’occasion d’exercer leur talent. Je dis toujours aux personnes qui participent aux ateliers que j’anime qu’ils ne sont pas là pour apprendre mais pour s’exprimer. La seule chose que l’on peut faire est de leur donner des éléments pour qu’ils puissent élargir leur champ d’expérimentation. Chacun suit sa trajectoire pour arriver à un art particulier, à un mode d’expression. (...)

Aujourd’hui, on peut faire du cinéma quotidiennement avec une caméra numérique. La technologie est tellement forte qu’elle avance, quoi qu’il arrive. Elle nous dépasse. Autant instaurer un rapport avec elle et multiplier les pratiques artistiques rendues possibles par un système de production allégé. C’est une liberté considérable et une façon de résister, en faisant de la poésie, en créant. Ainsi, j’ai pu réaliser la correspondance filmée avec Víctor Erice ou des installations vidéo. Même si, pour moi, il s’agit toujours de faire des films.

Ce que, dans le champ de l’art contemporain, on nomme « installation » existait avant même que le cinéma ne se forme. On sort de chez soi et on « vit » des installations. Dans la rue, lorsqu’on traverse, il y a des lignes fixes, un arbre, des voitures qui passent, un embouteillage, le ciel changeant... Cependant, mes pires films ont été mieux regardés que mes meilleures installations. Quel que soit le geste artistique, on ne peut pas le considérer comme art s’il n’est pas en train de nous raconter une histoire. Et c’est au moment où les spectateurs y prennent part qu’elle commence à exister réellement. Une œuvre d’art est moderne à partir du moment où elle accepte plusieurs interprétations. C’est ce qui fonde la différence entre classicisme et modernité.

Abbas Kiarostami.
(Propos recueillis par Marianne Khalili-Roméo.)



Dossier de Presse du Film









"Lumière et compagnie" (1995)est un film réalisé par une quarantaine de réalisateurs, dont Abbas kiarostami. Chaque film devait suivre 3 règles :
Ne pas dépasser les 52 secondes ; Pas de son synchrone ; Pas plus de trois prises. (Voix Isabelle Huppert)







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